Wednesday, April 3, 2013

FPDV N°38 PRESENTE ELISE BOULARAN / Photographe / Allemagne/France

L'aura précaire
                        
Les photographies d’Élise Boularan se distinguent par leur apparente simplicité. L’indicible du vivant émane tel un état gazeux, les visages équivoques apparaissent dans leur constitution fragile : la contenance de l’immatérialité de l’âme. Ainsi nous est révélé à demi-mots l’aura d’un sujet, l’émotion d’un paysage, la couleur d’un climat ou l’intensité d’une rencontre. Dans une pureté retenue et une intrigue latente les modèles se dévoilent lentement et les paysages s’étirent invariablement, irrésistiblement. Les individus cèdent un peu de leur intimité «envoûtante» et de leur beauté intrigante. Ils confient leurs rêveries dans une attitude réservée, se délivrent largement et se dénudent tendrement. Une expression pudique et humble nous est transmise par le parcours incertain des êtres croisés, des affinités développées et des amours trépassés. On n'y voit la présence naturelle habitée, variable, de l’indélébile mémoire.





Dans la combustion de l’instant, quelques âmes déambulent dans des paysages désertés, se déplacent dans des lieux insolites et progressent dans des territoires indistincts :   intérieurs domestiques dépouillés d’information, friches banales, forêts impénétrables, océan tourmenté, ciel orageux et zones périphériques… Des espaces atemporels sont traversés de lumière. Ils sont à la solde des éléments naturels et ils changent également au fil du «climat des identités». Un silence habité, exalté dans une lumière laiteuse, un silence vibrant, animé par la pigmentation colorée, un silence éclatant, résonnant dans la profondeur ténébreuse d’une interminable virée nocturne… Ainsi un approximatif et profond sentiment d’existence nous atteint : l’omniprésent et invisible état d’éveil au monde.





Cette chasse aux indices dans l’apparente simplicité de l’image rend compte de la précarité d'une quête ou d'un désordre contemporain. Le magnétisme banal des rencontres traversées ou les paysages étirés de la désolation future sont comme le panorama d’exil d'un songe intérieur, d'un tourment imminent...

Nicolas Savignat

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